La mobilisation ne faiblit pas à Notre-Dame-des-Landes. À l'appel des composantes de la lutte, ce quatrième rassemblement de l'année a drainé une foule innombrable aussi nombreuse que les fois précédentes, sinon plus. Armée de bâtons décorés, sculptés, peints ou gravés de slogans, elle s'est rassemblée en trois points distincts de la ZAD pour converger ensuite vers un champ de cinq hectares à la ferme de Bellevue, point central de cette journée avec à la bouche de chaque participant le serment collectif, scandé haut et fort en direction des autorités: " Nous sommes là, nous serons là", pour leur signifier clairement sa détermination 'empêcher l'expulsion des habitants de la ZAD afin que ce projet stupide et inutile d'aéroport soit définitivement enterré. Sur place, les gens du cru n'y croient guère. Comment le pouvoir faussement socialiste pourrait-il ordonner une évacuation qui tournerait à la confrontation violente avec toutes les dérives possibles et les drames humains qu'elle provoquerait. Tout le monde à encore en mémoire la mort de Rémi Fraisse à Sivens. À quelques mois de l'élection présidentielle, le pouvoir ne peut pas se permettre une telle aventure dans laquelle il s'embourberait et perdrait totalement sa crédibilité, enfin le peu qui lui reste. À moins qu'il veuille se faire hara-kiri, mais cette option suicidaire est peu probable, même avec les coups de menton d'un Manuel Valls aussi enragé qu'il peut l'être. Il a déjà fort à faire avec les migrants et réfugiés de Calais dont l'évacuation totale est imminente sur la jungle que le gouvernement veut raser. Mais des liens se sont inéluctablement tissés entre ces différentes populations menacées, exclues, vilipendées, surveillées, agressées, violentées qui dérangent tant ce pouvoir au service exclusif des possédants et de la finance capitaliste.

Des associations en aide et en soutien aux migrants de Calais, comme No Borders en particulier, étaient là samedi dernier sur la ZAD. Des prises de paroles, il y en a eu sur ce site hautement symbolique des combats et les luttes qui se mènent un peu partout contre des projets dangereux, nuisibles, destructeurs pour l'environnement comme ceux contre la ligne TGV Lyon-Turin, contre l'enfouissement des déchets radioactifs à Bures, contre la construction d'autoroutes supplémentaires, d'aménagements bétonnés démesurés, d'usines à vaches, de centres commerciaux qui bétonnent toujours plus le territoire en détériorant gravement les écosystèmes et la nature. À croire qu'il n'y a pas eu de conférence sur le climat à Paris en novembre dernier dont l'accord final fut pourtant signé par un grand nombre de pays. À croire qu'il ne s'agissait que d'une mascarade pour mieux aveugler le peuple. Mais la ficelle est un peu grosse. Ses yeux sont décillés. Ils étaient 40 000 manifestants sur la ZAD selon les organisateurs dont le chiffre paraît plus proche de la réalité que les 12 800 de la préfecture qui a une propension à minimiser l'importance des mobilisations d'opposants. Des syndicalistes également étaient présents pour apporter leur soutien comme le délégué CGT à Vinci, Francis Lemasson. La répression policière durant les manifestations contre la loi travail n'a pas été oubliée. La mémoire reste vive. Amal Bentounsi du Collectif "Urgence, notre police assassine" l'a rappelé avec beaucoup d'émotion.

Réussite totale donc pour cette mobilisation automnale à Notre-Dame-des-Landes où des milliers de bâtons multicolores ou transformés en totem furent plantés dans la terre d'un talus comme autant de piques hérissées pour défendre ce lieu exceptionnel où une autre organisation sociale faite d'autogestion, d'autonomie, de sobriété et de mise en commun est en train d'éclore comme autant de bourgeons pour un futur possible. D'ailleurs, l'une des deux structures en bois en construction a été dénommé le "hangar de l'avenir", alors que l'autre le "hangar de la défense" est voué à l'accueil des gens qui viendraient soutenir la ZAD en cas d'opération policière massive.

Notre-Dame-des-Landes, c'est maintenant et demain, c'est surtout une expérience et un mode de vie qui renouent avec le communisme originel.

Willy Proust

LES DIAPORAMAS DE LA JOURNÉE