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Une société et des partis au pouvoir en crise


Militant depuis 50 ans, John Pickard affirme qu’il n’a jamais connu une crise aussi profonde du Parti Conservateur britannique, tant du point de vue économique que pour ses conséquences politiques. Theresa May voudrait parvenir à un accord mais l’UE et la Grande-Bretagne n’arrivent pas à s’entendre parce que les négociations qui ont lieu au sein même du Parti Conservateur sont particulièrement tendues. Selon John Pickard, une bonne moitié de ses membres défend les vieilles traditions impérialistes de la G-B, ces traditionnalistes pensent qu’il suffit de couper tout lien entre l’UE et la GB, sans négociation financière. En imaginant commercer par la suite avec les USA, la Chine, l’Inde, ils n’ont pas assimilé l’affaiblissement de la Grande-Bretagne. Des « illettrés politiques » favorables à un Brexit dur, dit-il.


L’autre aile du Parti Conservateur cherche une sortie négociée en pensant maintenir des échanges économiques, la liberté de circulation proche de ce qui existe actuellement dans le cadre de l’Union européenne. Ils souhaitent sortir de l’UE sans grands bouleversements.


Les groupes capitalistes, eux, exigent une période de transition de 2 à 3 ans après la sortie de l’UE pour garder un accès au marché européen et les mêmes relations monétaires ; ils comprennent qu’une catastrophe économique guette le pays.

John Pickard est président du Syndicat national des Enseignants dans le comté d’Essex et militant engagé du Parti Travailliste de Grande-Bretagne (G-B). Il est venu en France à l’invitation de La Riposte et de plusieurs sections et fédérations communistes et syndicales françaises. À Mainvilliers, vendredi 24 novembre, il a été écouté par un auditoire curieux et captivé de communistes et de militants écologistes et de la gauche alternative d’Eure-et-Loir.


Pourquoi le brexit l’a-t-il emporté ?


Un mot l’explique : l’austérité. Les travailleurs anglais ont subi la baisse de niveau de vie la plus forte en Europe, en-dehors des travailleurs grecs. La G-B a connu la plus longue période de stagnation depuis les guerres napoléoniennes. John Pickard cite les réductions de  moyens dans la santé, les privatisations de services, les coupes budgétaires dans l’enseignement avec suppressions de postes ; une crise du logement aiguë dans le sud. Les dirigeants des trois partis, Conservateur, Travailliste, Libéral sont comparés à des « clones » tant leurs programmes politiques étaient ressemblants avant l’arrivée de Jeremy Corbyn à la tête du Labour Party (= parti travailliste).


Depuis le gouvernement Thatcher, des régions sinistrées ne se sont pas remises. En G-B comme dans d’autres pays européens, cette politique a eu comme effet le rejet des partis traditionnels par beaucoup de travailleurs. Après avoir supporté 30 ans de dégâts économiques, cela n’a rien d’étonnant. J. Pickard dénonce aussi la presse « yellow » (de caniveau). La xénophobie à l’égard des étrangers, des musulmans s’est développée dans la population ainsi que la volonté de reprendre le contrôle des tribunaux, de la monnaie et surtout des frontières. Le succès du vote pour le brexit a ensuite donné une légitimité à des forces racistes violentes qui n’ont pas hésité à s’attaquer à  des personnes d’origine étrangère.

Face à cela J.Corbyn a présenté « la position la plus correcte » au moment du référendum, disant que l’UE est loin d’être parfaite, qu’elle doit être réformée mais qu’on ne peut pas revenir en arrière. Et ses propositions étaient correctes d’un point de vue socialiste, affirme le militant.


John Pickard décrit le système de marché unique actuel comme le « produit naturel et inévitable du système capitaliste » évoqué par les analyses de Marx. La capacité productive du capitalisme a outrepassé les limites des états nations. Mais vouloir diviser le marché capitaliste en 27 marchés capitalistes n’est pas la solution. La gauche du Labour est en faveur de « la nationalisation et la planification des ressources ».

Jeremy Corbyn lors d’une manifestation pacifiste à Londres en août 2014


[Photo Garry Knight, WikiMediaCommons]

Fabien Lecomte (PCF) présente l’orateur

John Pickard,

une expérience exceptionnelle

Une expérience exceptionnelle : l’ascension de Jeremy Corbyn

 

John Pickard décrit avec gourmandise la progression de l’influence de J.Corbyn, « le meilleur chef du Parti Travailliste depuis 1945 ». Dans le parti lui-même il a été choisi deux fois puisqu’après l’exigence d’un 2è vote par les parlementaires de l’aile droite du parti, il est passé de 57% à 62%. Au long de ces deux campagnes, les réunions publiques ont atteint partout un nombre exceptionnel de participants. Notamment avec beaucoup de jeunes malgré la presse hostile à Corbyn et les critiques de l’aile droite du Labour. Les militants syndicaux eux-mêmes (dont les organisations sont affiliées au Parti Travailliste) ont appuyé sa candidature et entraîné leurs directions plus hésitantes.


Pour les législatives de juin 2017, le programme était clairement anti-austéritaire : renationaliser les chemins de fer, le secteur de l’énergie, la poste, soit la plate-forme politique la plus radicale depuis la fin de la guerre.


Ces élections législatives anticipées ont été voulues par Theresa May pour conforter sa majorité. Mais c’est le Labour qui a connu une forte progression en voix et ces campagnes successives ont permis à ce parti de rajeunir et d’augmenter ses effectifs à 600 000 adhérents, le plus grand parti  politique en Europe.


L’orateur ne manque pas de noter que les sondages donnent de l’espoir. Il pense qu’il peut y avoir une nouvelle élection législative ou un nouveau référendum et que le Labour gagnera. Mais il n’ignore pas que les pressions contre le parti travailliste seront fortes et que le parti lui-même risque l’éclatement.


Ce riche exposé a été suivi de questions et du verre de l’amitié… franco-britannique.

Un témoignage de première main

sur le bouillonnement politique en Grande-Bretagne après le brexit


John Pickard : « Corbyn,

le meilleur chef du Parti Travailliste depuis 1945 »